Welcome in My World ( pv Sanzo)

Académie Tomorrow, Chambre de Jade Oldfield, 08 novembre 2025

Je crois que cette connerie de réveil sonne pour la deuxième fois. Et pourtant mon désir le plus profond est de ne pas lui accorder plus d’attention qu’à la première. Je me fiche bien de savoir quelle heure il est, ce que je sais c’est que j’ai veillé une partie de la nuit pour écraser littéralement la Ligue d’Ubuzu à Mathematic- Quest en ligne, c’est chose faite et je garde donc ma place dans le top ten des meilleures joueuses en réseau d’énigmes en maths appliquées. Ça vous parait con ? Oui ben ce sont mes loisirs et comme dirait ma sœur, je vous emmerde.
C’est dimanche et qui dit dimanche dit glandage au moins jusqu’à 11 heures du mat ce qui est pour moi une heure décente pour se lever. De toute façon, je ne vois pas trop bien ce que je pourrais faire, ce n’est pas comme si c’était un jour particulier, non ? Si ? Oh zut ! Je veux juste dormir…Retrouver mon royaume d’équations et de fonctions linéaires…le merveilleux pays de Jade la science ou tout est ordonné et abscisses.
Je comate à nouveau…

Erfff…cette sonnerie-là, je la connais, ce n’est pas le réveil. D’un geste, j’émerge un bras hors de ma couette et je tâtonne à côté du lit sur le sol en grognant jusqu’à ce que mes doigts se referment sur l’objet métallique. Que deviendrait ma vie sans toi fidèle compagnon ? Pas grand-chose, mon téléphone dernier cri c’est le graal de tout jeune de mon âge, c’est mon ami le plus intime ou je range ma vie, je ne pourrais pas m’en passer, c’est comme ça…. Je me retourne sur le dos, vaguement agressée par la lumière du jour dans la chambre, les yeux toujours à demi clos.
Je sais qui m’appelle, chaque sonnerie et personnalisée, celle-là s’appelle « bordel t’as intérêt à répondre Jade !!! », en docilité parfaite et surtout parce que je n’ai pas envie de fournir des explications plus tard, j’actionne le bouton.

- Uhmmmmm ?
- …Oh. La nuit fut longue ? Tu sais que ça fait 3 fois que j’appelle ? J’allais envoyer quelqu’un voir…
- Uhmmmmm…

- Tu apprends encore une nouvelle langue ?
- Nannn j’suis réveillée, je traine un peu c’tout…
- Ça me manque de venir te secouer le matin pour te tirer du lit, ma fille. Mais au moins j’ai découvert les joies de nos conversations matinales si riches…
- Sarcasme, m’man. Moi ce qui me manque c’est tes pancakes. Hummmouaaaarf.
- C’est toi qui a voulu jouer la grande fille, être indépendante...
- Nope…tu n’avais plus le temps pour les pancakes.
- Mais j’en trouve toujours pour te réveiller le matin lorsque tu me le demandes…
- …Je te l’ai demandé ?
- Oui, trois fois hier, plus les textos. Vu que tu n’as pas expressément voulu me répondre sur la raison, je suppose que c’était parce que…
- OH !!! Merrrrrde par le sang du christ !!!!!
- …c’était parce que tu avais prévu un truc avec Sanzo….et le « par le sang du christ » c’est MON expression, jeune fille.

J’émerge en urgence en mode panique. Quelle heure on avait dit ? 10 h je crois… un coup d’œil au reveil : 9h35.

- Meeeeeerde !!!
- Jade…on croirait Aislinn là.
- Je suis grave à la bourre Maman !!! Je..tu…je…
- Oui…oui…tache de ne pas oublier que je passe vous prendre tous les deux a 14 h pour les essayages pour la cérémonie.
- Que…la cérémonie ??? hein ?...euh…

Je saute du lit, attrapant d’une main mon t-shirt de nuit pour l’enlever, exécutant une petite danse imbécile en sautillant d’une jambe sur l’autre

- Ce…c’était c’t’aprem … ?
- (soupire) Jade….Grand mère et moi, on veut te voir EN ROBE, c’est un moment important, tu dois être à mes cotés et estime toi heureuse qu’on rhabille Sanzo aussi, après tout vous n’êtes pas « fiancés »
- Ouais ouais….je sais….les convenances, la représentation…toussa.
- Les cérémonies de la commémoration du Big Day sont un moment important pour notre famille.

Je cours vers la salle de bain à demi nue pour attraper de vêtements propres tout en tenant le téléphone vissé entre mon épaule et ma tête.

- Elle…elle sera là ?
- Elle SERA là, même si cela ne lui plait…pour l’instant elle me filtre.
- Ecoute…laisse-moi lui parler ok ? Sinon ca va encore se terminer en bataille rangée…
- Je m’en fiche, elle fera ce que j’ai dit.
- Justement non, si tu lui dis de le faire, elle ne le fera pas…Je la connais c’est ma sœur.
- Et c’est aussi ma fille.
- …Et je connais aussi notre maman…alors…laisse-moi faire pour une fois… Ecoute, je suis mégaaaa à la bourre là. On en reparle tout à l’heure ?
- Pas de bêtises avec Minou ok ?
- Moi jaaaaamais…et puis tu nous laisse si peu de temps….
- Bien suffisant pour se retrouver grand-mère….
- Mamaaaaaan !!! O____O
- Ne sois pas en retard a 14 h , Ptit Citron….et je vais essayer de te trouver des pancakes.
- Ca vaudra pas ceux que tu fais…bisous.

Je repose dans l’urgence. Dix minutes pour me préparer et être sur la place du Forum universitaire…Olalala Jade, tu aimes vraiment les challenges ! C’est mission impossible, je peux assurer le maquillage léger et essayer de rassembler les cheveux en une queue de cheval, facile mais au revoir la coupe à frange, on fait ce qu’on peut !!!
Ma vie est vraiment compliquée, c'est comme ça qu'on est une Oldfield doublée d'un petit génie !!

(8 novembre 2025 - 7h)

J'aime les weekend et particulièrement les dimanches. J'aime aussi me lever tot. Tout est si calme, si silencieux. Bon moins qu'à Miami. New Heaven est une ville qui ne dort pas beaucoup. J'aime Paradise et son chic. J'aime le X Center. Et surtout je l'aime elle.

Je m'étire brièvement avant de jeter un coup d'oeil à ma chambre. Elle est si vaste. Tout l'appartement d'ailleurs est vaste et ostentatoire. Un peu trop. Je préfère ma piaule au X Center même si étant en dernière année j'y suis seul. Mais bon, mon père a un standing à tenir et il le tient. Je sais que Karl est aussi levé et que le petit dej est prêt. Hier soir on a parlé longtemps, vraiment longtemps. J'aime me retrouver en tête à tête avec lui. Il me comprend tellement bien.  

"Salut mon grand. Déjà levé" me lance t il en souriant par dessus le journal. Je lui rends son sourire accompagné d'une brève pression sur l'épaule. Puis tout en me servant une généreuse portion d’œufs et de bacon je poursuis
"quoi de neuf ? Combien papa a t il ramassé depuis hier. "

c'est une blague entre nous, il est certain que je ne le dirais pas devant mon père. Je l'adore bien sur c'est mon père mais parfois, il est un peu trop ... enfin un peu trop quoi.
Je ne me plains pas de son argent. C'est agréable de ne pas en manquer. Enfin au moins il a renoncé à faire de moi un businessman. C'est déjà une bonne choses. J'expédie mon ptt dej. J'ai pris l'habitude d'aller courir même le dimanche, même pendant les vacances. C'est un rituel. J'aime courir, j'ai toujours aimé courir. Et puis ici je me sens si libre. Vraiment libre. Personne ne me regarde. Personne ne me juge. Nous sommes tous des mutants ou presque.
D'un regard interrogatif je demande à Karl s'il veut m'accompagner. Pas aujourd'hui.
Vétu d'un short et d'un Tee-shirt, casque sur les oreilles je pars pour mon circuit habituel. Je ne sais même pas combien il fait. Des mouettes m'accompagnent un bref instant crevant le ciel de leur blancheur et de leurs cris rauques.
Je remonte les Champs Élysée admirant les vitrines qui commencent à se parer de leur décoration de Noël. Il n'y a personne. Trop tôt. Et puis on est dimanche. Des amoureux main dans la main cherchant à "finir" leur nuit. Quelques touristes facilement reconnaissable à leur regard. La plupart sont des non-mutants. Je les dépasse avec un sourire et un léger battement de queue. Au moins ils reviendront avec le souvenir d'avoir vu un "vrai" mutant. J'en rigole tout seul.
Je bifurque ensuite vers Cultura Center. Je n'aime pas particulièrement l'Opéra mais comme Noel approche je me renseigne. Papa sera surement plus ravi si je lui offre des places plutôt qu'une nouvelle cravate. Et puis j'aime beaucoup aussi Art-Street. Les galeries et les boutiques sont vraiment belles et bien sur hors de prix.

Pour finir par la place du Souvenir sur laquelle je m’arrête toujours au moins 5 minutes. Il y a du monde ... enfin pas vraiment à cette heure.
Je remercie brièvement et silencieusement tous les héros morts pour moi, pour nous. Je ne suis pas particulièrement croyant, c'est plus une forme de respect. Ils sont si nombreux. Mais grâce à eux, je suis en vie. Grâce à eux, je respire libre. Grâce à eux, j'aime. Grâce à eux, j'envisage mon avenir. Ça serait bien ingrat de ma part de ne pas les remercier. Ils ne sont pas morts pour rien. Ils ne sont pas vraiment morts d'ailleurs tant qu'il y a aura des jeunes comme moi, comme nous, les Cadets de la X force. Nous sommes leur héritage. J'ai aussi une pensée pour celles qui m'ont "poussé" à devenir qui je suis. Deux femmes formidables.

10 ans à la fin du mois. 10 ans que la "terreur", le "monstre" a été tué. Je me souviens de la peur même si personnellement je n'ai pas vraiment eu à souffrir de cette guerre. "privilégié" voilà ce qu'on me balance parfois. "on" étant les autres cadets, certains jaloux, certains envieux. C'est vrai que j'ai eu de la chance. La chance d'avoir un père comme le mien. La chance d'avoir de l'argent. Mais je ne suis pas que ça. Je suis aussi ce que j'ai toujours voulu. Ce que mes pères ont fait de moi. Je n'étais pas obligé de devenir un Cadet mais je l'ai voulu. Je l'ai toujours voulu.

Je cours et mes pensées s'envolent vers mon passé plus ou moins lointain.

(9h)

Va falloir que je rentre. J'ai rendez vous avec Jade. J'espère qu'elle n'aura pas oublié. Ce n'est pas qu'elle est tête en l'air, juste flemmarde. Elle déteste se lever tôt. Parfois je me demande comment nous arrivons à si bien nous entendre alors que nous sommes si différents l'un de l'autre. À moins que justement ça soit cette différence qui nous lie. D'un autre coté, je sais que je n'aimerais pas quelqu'un qui aurait les mêmes gouts que moi, c'est trop monotone et triste.
Une bonne douche, la seule eau que j'apprécie - sans parler du fait que Jade est hyper maniaque. Jean, chemise, je m'oblige à mettre des chaussures (beurk je déteste), veste.

(9h50)

L'Academie Tomorow. Encore des souvenirs. Elle n'a pas beaucoup changé en 3 ans. Je m'assoie sur l'un des bancs du parc. Je suis en avance et y a de grande chance pour que Jade soit en retard. Quelques élèves sont déjà entrain de bucher appréciant l'extérieur à l'intérieur. Ce que je comprends parfaitement. C'est plus sympa que la bibliothèque, plus bruyant aussi bien sur mais bon on ne peut pas tout avoir.
Qu'est ce que je me suis amusé ici.
Je me revois avec Sean et Kamen, mes inséparables compagnons de bêtises. Dire que j'ai fait parti de la première vague d'élèves.
Quelques filles me sourient et je leur réponds. J'espère que Jade va arriver avant que l'une d'elles n'engage la conversation. Je ne sais pas pourquoi j'ai la cote avec les filles. Bon c'est flatteur bien sur mais un peu gênant aussi quand on a une petit amie, surtout que je suis incapable de les repousser. Peut être le sentent elles ... les filles peuvent être si sournoises.

Je déteste courir, en fait je déteste qu’on me force à faire du sport et puis de toute façon, on ne peut pas vraiment dire que je suis la sportive de la famille, Aislinn s’en sortant beaucoup mieux que moi dans le domaine. Maman dit souvent en s’amusant que je suis la tête et qu’elle est les jambes, mais toute ma brillante intelligence ne saurait m’empêcher d’être une fois de plus à la bourre !

Un dernier regard à ma glace et un profond soupire, je ne ressemble définitivement à …rien. J’ai des épis dans tous les sens, si je sais que Sanzo n’y verra pas d’importance et qu’il trouvera ça « amusant », j’ai de fort doutes si on croise Grand-mère qui déteste le manque de tenue en public qu’elle ne me fasse pas de commentaires négatifs. Pas que son avis m’importe mais ce sera beaucoup plus difficile de la gratter ensuite pour avoir le dernier Iphone SS4 puisque Maman m’enverra chier de toute façon en prétextant que je n’en ai « aucune utilité » par rapport au SS3. Mais sérieuuuuux !!! On est à la préhistoire là ? Une Geekette pas à la mode est une ratée socialement IRL et sur réseau et ce n’est pas parce qu’ils ont décidé de taper leur mémo à coups de silex que je dois cesser le confort d’une vie MODERNE et ultra connecté ! Déjà que j’ai fait de GROS effort pour cesser le look gothique, ça mériterait une modeste récompense quand même ! Il me restera toujours la possibilité de gratter Sanzo qui grattera beau papa mais j’aimerai éviter d’en faire un drame shakespearien aussi parce que Maman tique toujours lorsque le père de mon homme se montre généreux avec moi, de toute façon, elle tique à tout ce qui m’approche à moins de 100 mètres.
J’ai quand même passé une aprem à chercher dans l’appart’ si elle n’avait pas placé des caméras ou micro afin d’espionner ma vie intime avec Sanzo, je n’ai rien trouvé mais je ne suis toujours pas convaincu qu’elle ait renoncé à son hyper surveillance…Au fond je n’ai la paix que quand Aislinn débarque, ça la monopolise et leurs « querelles » sans fins lui occupent l’esprit me laissant…le champ libre ! Hé ! Un coup d’œil à ma jupe plissée, ok c’est assez court mais il ne fait jamais froid à New Heaven, la température en hivers est de 5, 6 degrés, de mémoire, je ne me souviens pas avoir vu tomber de neige ici, même au temps….d’avant.

Bon il est dix heures dix, c’est mort : je n’ai pas le temps de déjeuner mais je suppose qu’on le fera quelques part, j’enfile ma veste de tailleur et j’embarque dans le coin cuisine mes couverts lavés et enveloppés d’essuie-tout pour les fourrer dans ma poche, je ne peux pas manger sans eux, c’est comme ça.
Opération sandalettes en espérant ne pas filer mes nouveaux collants opaques et il ne me manque plus que mes gants de flanelle teintés en violet (ma couleur dominante) et on peut y aller : 10 h 17, bon je limite la casse et puis il a l’habitude quoi ! Merde !
Je traverse le couloir rapidement d’un pas pressé et je croise Carole Anne, voisine étudiante en Droit qui depuis qu’elle sait qui je suis et qui est ma mère me suce les roues en attente de…je ne sais pas, mais en attente de quelque chose.


- Salut Jade ! Tu es bien matinale dis donc…

Je la dépasse sans me retourner

- Moi, Toujours ! Ben si tu te levais plus tôt, tu le saurais.
- Non, je voulais dire…
- Ben moi je dis qu’il est déjà bien tard pour perdre du poids avec un jogging, ou alors t’en reviens mais tu n’as pas l’air très…éprouvée. Ne te lances pas dans des missions impossibles, retourne à tes livres, tu feras une bonne avocate !
- ….tu crois ? …pour avocate ?
- Ouais ouais….a plus !

C’te conne, elle n’est déjà pas capable d’orthographier son nom de famille correctement alors de citer un article de lois juridictionnelle ce n’est pas demain la veille. Je la laisse derrière comme la relation sociale sans avenir qu’elle est et l’air frais de la ville me saute au visage lorsque je m’engage sur le parvis de la cité universitaire.

7 minutes de plus pour arriver au Forum et je le cherche du regard,…Ok, il est en grande conversation assis sur un banc avec une blondasse style lycéenne bobo attardée. Cette journée commence fort. Mais je suis une Oldfield, je vous l’ai dit.
Affichant un sourire qui a tout du rictus je réduis l’espace jusqu’à eux et m’incruste dans leur conversations sans ménagements ni délicatesse.

- Salut…Sorry pour le retard, Minou.

Un regard amusé à la blonde qui semble ouvrir la bouche pour bredouiller quelques mots.

- Tututut ! Stop ! On va faire les choses vites et bien du coup. Je suis une mutante mais pas une télépathe mais je peux tout de même répondre à cette question qui traine dans ton esprit depuis que tu as décidé de tenter ta chance. C’est mort. C’est mon copain.
Après a toi de voir si tu tentes ta chance, perso on se connait depuis nos 9, 10 ans ce qui me confère de l’avance. Je n’ai ni ta blondeur, ni tes courbes, ni tes centimètre et peut être pas ton « savoir-faire » en matière sexuelle vu comment tu racoles mais ce que je sais c’est que tu n’as certainement pas mon intelligence sauf si tu veux faire une battle d’inéquations à 4 inconnus en impro et là…franchement pour le coup tu risques de m’intéresser plus que lui. Ce que je sais aussi c’est que je suis capable de t’allonger là en trois mouvements et te défoncer la tête sans trop de problèmes, c’est l’avantage d’avoir été élevé par une X Men. Enfin pour t’aider à relativiser, il y a plus de 7 millions d’habitants ici et le taux de citoyens entre 18 – 25 ans est de 10 % et le taux de male de 51 %, ce qui te laisse un cheptel d’au moins 350 000 personnes à côtoyer et à vue de nez…avec comme corolaire, classe sociale, célibat, santé….un potentiel de 55 000 personnes de libres…..

C’est une superbe journée, il y aura un taux de sortie dans les rues de 40 %, tu as donc au final si on compte la géolocalisation sur 5 km carré, 720 chances de concrétiser avant que ne tombe le soir ! Donc celui-là….tu peux l’oublier et te dépêcher de te mettre au taff, blondie.
Parce que bien sûr, je n’ai pas fait le calcul de la concurrence et je peux….
Apres si tu veux, on peut se maraver la gueule mais c’est très primaire tout ça…et on risque de se salir et ça je n’y tiens pas trop.


Je termine sur un large sourire carnassier et comme elle ouvre la bouche ulcérée en gémissant un « heinnn ? » des plus éloquent, je m’en désintéresse et reportant mon attention sur Sanzo avec une expression boudeuse.

- Oui c’est ça….bon courage. Bon, tu as fini de me faire attendre, toi ? et où es ta moto ? Me dis pas qu’on va devoir marcher….

Un silence embarrassé avant que la jeune fille dépitée finisse par s’éloigner. Je soupire rassurée et jette un regard un peu ombrageux sur Sanzo en murmurant.

- T’es pas croyable…Je finis par croire que tu aimes me voir faire ce numéro…c’est méchant de jouer avec ma jalousie Minou. Un jour je vais devoir vraiment me battre, ça t’amusera moins d’expliquer ça à Maman. Ou alooooors….

Je me baisse pour prendre son visage entre mes mains, posée là à quelques centimètres de lui.

- Je défigure à coup de griffes ce visage d’ange…comme ça, fini d’exciter le voisinage…mais..ca serait un crime, non ?

Je ne le laisse pas répondre, appliquant mes lèvres au siennes pour un profond baiser.

et voilà c'était évident. Tellement évident. Elle est pas vilaine bien sur, un peu jeune peut être. Et moi toujours bien trop gentil. Un autre coté Jade est encore en retard.
Ouai je sais mais que voulez vous je l'aime comme ça mon "ptit citron".

J'écoute poliment mais distraitement la fille me retenant de consulter mon téléphone. Et puis elle arrive. Elle est si belle. Mes yeux la détaillent et je retiens un sourire. J'aime ses cheveux en pétard. J'aime ses yeux furibonds. J'aime son look. Je m'attarde un instant sur sa poitrine avant de descendre. Jupe plissée qui lui donne l'allure d'une collégienne. Quoique ... Ses collants opaques m'excitent bien plus que si je voyais ses jambes. J'aime sa voix même si elle n'est pas super contente. Je n'entends même pas ce que la blonde me dit et pourtant. Non seulement je n'ai d'yeux que pour Jade mais son odeur m'enivre en plus.

Puis Silent "surgit" et la fille en prend plein la figure (oserais je dire : à ma plus grande joie ...). Jade lui assène son attaque favorite qu'elle maitrise à merveille et mon sourire s'agrandit. 1-0 pour Jade.

La fille abandonne, dommage un combat ça aurait été sympa pour commencer ce dimanche. Pire qu'une tigresse. C'est qu'elle le défend son territoire.

Bon à mon tour maintenant. Sa jalousie me rassure. Même si d'un autre coté elle est inutile et un peu absurde. Il n'y a personne d'autre, depuis le temps elle devrait la savoir.

- T’es pas croyable…Je finis par croire que tu aimes me voir faire ce numéro…c’est méchant de jouer avec ma jalousie Minou. Un jour je vais devoir vraiment me battre, ça t’amusera moins d’expliquer ça à Maman. Ou alooooors….

je lui sourire un peu provocateur. Elle n'a pas tort même si techniquement ce n'est pas moi qui vais vers les autres filles. Même la "menace" de Cait ne me fait pas peur ... enfin pas trop.


- Je défigure à coup de griffes ce visage d’ange…comme ça, fini d’exciter le voisinage…mais..ca serait un crime, non ?


wahou ... bon peut être que là ça va un peu loin non ? Et puis comment voulez vous que je me concentre quand elle me regarde ainsi. Aussi près. Aussi belle.
Et enfin elle m'embrasse. Je me dis qu'elle devrait commencer par ça en fait. Mes lèvres s’entrouvrent sur les siennes. Je goute son haleine si chaude. Et plus rien n'a d'importance. Elle sait très bien l'effet qu'elle me fait et pas seulement physique. C'est tout elle que je goute. Que j'entends. Que je sens.
Ses cheveux qui me chatouillent.
Ses mains si chaudes à travers le tissus de ses gants.
Son coeur qui bat.
Son sang qui circule.
Je suis incapable de lui résister. Autant quand on est seuls dans une chambre c'est pas bien grave autant là en plein air ...

Je l'attrape et l'assoie sur mes genoux. L'une de mes mains dans le bas de son dos l'autre sur sa cuisse. Nos lèvres toujours collées. Ma langue taquine la sienne. La sensation est si douce et si intense. Je crois que je pourrais rester indéfiniment ainsi.

Heureusement (ou pas) son ventre se met à grogner. Me (nous) ramenant à la réalité. Je m'écarte très légèrement. Trop à mon goût.

"bonjour ma belle" ma voix est rauque, encore pleine du désir qui me submerge. Ma main quitte sa cuisse pour son visage que je caresse avec douceur et tendresse.

"tu as faim ?"

moi aussi mais uniquement d'elle. Je crois qu'on avait prévu un truc mais ... Elle m'a aussi posé une question et même plusieurs. Faut vraiment que je reconnecte mon cerveau là. En tout cas c'est pas en la fixant ainsi que je vais y parvenir.  
Je me demande brièvement si elle ressent les mêmes choses que moi. Elle au moins sait l'effet qu'elle me fait alors que moi ... Je soupire, c'est injuste.

La moto ... oui voilà ce qu'elle m'a demandé. "ouai elle est garée pas loin". J'ai une brève et ridicule bouffée de jalousie pour cet engin. C'est stupide mais je me demande si elle ne la préfère pas à moi ...

"tu veux aller ou ?"

moi je m'en fiche du moment que je suis avec elle. L'autre bout du monde, une île isolée au milieu de l'océan ou le petit resto du coin, rien n'a d'importance tant qu'elle est là.
New Heaven est peut être le paradis des mutants mais Jade est mon paradis personnel.

Je lui souris. Je sais ce qui se cache derrière ses mots. C'est que je la connais bien maintenant ma petit Jade. Elle râle, elle râle mais ce n'est que des mots. Ça façon à elle de me dire qu'elle m'aime. Bon c'est tordu je le reconnais et parfois un peu déconcertant.

Ses yeux pétillent. Elle pense que je ne le vois pas mais c'est faux. Je vois tout ce qui la concerne. Elle me tend la main avant de me rappeler le pourquoi de notre rendez vous. Je soupire très légèrement. Ça ne me dérange pas de faire les boutiques du moment que je suis avec elle. Mais j'ai un peu du mal à comprendre pourquoi Cait veut m'offrir un costume à ses frais surtout. Mais bon vu qu'en échange elle nous permet un week rien que nous deux et à Miami en plus, je supporte.

Ce n'est pas tant le fait des boutiques que l'achat. Des costumes j'en ai et je peux en avoir sans problème. Si encore elle m'avait proposé des jeux vidéo ouai mais un costume ...
j'ai pas compris non plus pourquoi papa avait accepté. Qu'est ce que Cait lui a promis à lui ? À moins qu'il n'ait une fois de plus simplement voulu me faire plaisir.
Enfin si elle veut dépenser son argent ainsi après tout c'est son fric, c'est idiot mais c'est son fric. Et puis tant que je suis avec Jade, le reste m'importe peu en fait.

Jade m'agrippe la main et je résiste légèrement par jeu. Son sourire s'agrandit j'adore.

Cultura super, j'aime cet endroit en plus j'ai déjà fait du repérage. Une "babiole" hein ... mouai. Je crois qu'on a pas la même notion de ce mot. D'un autre coté, elle va voir et vouloir tellement de chose que je saurais quoi lui offrir à Noel.
J'éclate de rire quand elle me parle de son pari avec Karl. Quelle tête de mule. Elle n'a aucune chance face à lui, même papa n'a jamais gagné.
Je me lève d'un bond, l'enlace et l'embrasse. "à vos ordres chef" je lui lance en riant, esquissant un bref salut avant de lui tirer la langue comme un gosse "et je dors jamais pendant les cours.

La moto ... bien sur je suis content de l'avoir, elle me permet d'étendre mon territoire d'exploration et puis c'est un véritable "piège à minette" mais d'un autre coté ... j'aime marcher et courir. De toute façon dans Paradise c'est chiant. Vaut mieux pas s'amuser à griller les feux rouges, dépasser la vitesse ou faire quoique ce soit d'un peu illégale. Pour vraiment profiter de l'engin le Outer c'est le top. En plus pas besoin de porter le casque, personne ne le fait, enfin ceux qui ont la chance d'avoir une moto, ou qui sont assez malins pour les voler sans se faire prendre.

Déverrouillant l'anti-vol et le range casque, je repensais à ce que m'avait dit papa. Cette moto il me l'avait offerte pour mes 18 ans et en plus il m'avait laissé la choisir. Je crois qu'il aurait préféré quelque chose de plus ... clinquant, gros, voyant mais moi j'aime bien celle-ci. Elle est bien assez grosse et puissante et puis Jade peut l'utiliser (un peu). Mais surtout il m'avait prévenu qu'il participerait aux frais normaux d’entretien mais que tout le reste serait à ma charge. Une façon "correcte" de me dire de ne pas faire le con avec. Je me souviens m'être demandé si à mon age, son père lui avait fait la même remarque.
Bien sur elle était grise.

"tiens tu connais les consignes" lui dis je en lui tendant son casque proprement enveloppé. Si je ne suis pas toujours les règles il est hors de question que elle les enfreigne. Je ne tiens pas à me faire tuer par sa mère, sa soeur, mon père et Karl ... pas forcément dans cet ordre d'ailleurs. Et puis s'il lui arrivait la moindre chose ... donc casque obligatoire. Le mien est noir tout simple avec en lettre d'argent mon pseudo mutant : Silver cat.

Une fois prêt on file sur Cultura. Je flâne. J'avoue adorer la sentir tout contre moi, ses bras autour de ma taille. Le trajet n'est pas très long malheureusement. J'aurais pu le faire durer mais je sais qu'elle a faim. Et une Jade qui a faim c'est pire qu'une bombe nucléaire.

Moto garée dans l'emplacement prévu et attachée plus par habitude que par réel besoin car ici pas de voleur bien sur, pas à Paradise. Et puis elle fait banale presque "pauvre" dans ce secteur de l'ultra luxe.
Ce qui me rappelle la première fois que je suis allé chercher Jade à l'Academie. Je l'attendais nonchalamment appuyé sur la moto, à la fois fier et modeste quand un groupe de mecs de la fac s'est pointé, attiré par l'engin flambant neuf ou par les filles qui s'étaient agglutinées pour le regarder. (je parle de la moto bien sur ..)

je bavardais donc tranquillement avec les filles quand un des gars a voulu faire le malin, se moquant de ma moto, des "pauvres" moyens de mon père et vantant les mérites de la sienne (toujours la moto), de sa puissance, de sa couleur ... et surtout de son prix proprement scandaleux.

Les vantards j'ai l'habitude. Y en a toujours et j'ai quand même vécu longtemps à Miami. Mais ce que je n'ai pas apprécié c'est le coup de pied (même si c'était pas forcément méchant) dans la roue. J'ai commencé par lui faire un sermon sur l'argent, son pouvoir et son utilisation mais cet abruti à continuer à me chercher tout en ricanant.
Je ne suis pas un violent, je n'aime pas vraiment me battre mais je n'aime pas non plus m'écraser. Peut être que s'il n'y avait pas eu les filles, ou si Jade n'était pas arrivée à ce moment j'aurais laissé tomber mais bon je suis un mec.
Mon poing a fini par partir droit dans son ventre lui coupant le souffle et ses ricanements. Un peu plus de 8 ans d'aikido et 2 ans comme Cadet au X center, je savais ou taper et comment taper.
Ouai je sais se battre pour une moto c'est nul mais c'était plus pour ce qu'elle représente que réellement pour elle.
En tout cas, le gars ne m'a plus cherché d'embrouilles. Ni lui ni son père. J'ai appris plus tard que ce dernier était l'un des juges les plus en vue de NH.

On part main dans la main à l'assaut des stands. Je l'observe pendant qu'elle cherche "une babiole". Plusieurs me plaisent beaucoup. Je lui fais doucement remarquer, les lui montrant pour avoir son avis. Nous n'avons pas forcément la même notion "du beau". Chacun ses gouts, chacun son style. J'aime assez le sien bien sur même si parfois il me laisse perplexe. De toute façon quoiqu'elle mette elle est belle, même toute nue ... enfin je le suppose.

Il y a du monde déjà. Je n'ai pas envie de la perdre même si je sais pouvoir la retrouver à peu près n'importe ou. Un stand un peu plus masculin m'attire. Je ne suis pas très bijoux mais certains bracelets sont très beaux. J'en essaie un, il est en bois. J'aime les matières naturelles. Puis le repose avant de reporter mon attention sur Jade. Après tout c'est pour elle qu'on est là, je reviendrais.

Je m'approche d'elle, passe mon bras autour de sa taille en souriant "alors tu trouves ? Y a des trucs qui te plaisent ?"
aucune impatience dans ma voix. Je suis un mec génial que voulez vous.

C’est comme ça que j’aime ma vie.
C’est ainsi que je l’ai rêvé, bien sûr je sais que je n’ai jamais vraiment eu à me battre pour obtenir ce standing, j’en ai bien conscience. Ma mère a prit soin de m’éviter tous les écueils et les difficultés. Mes cicatrices sont anciennes et profondes, j’ai vécu une enfance qui ne m’appartenait pas avec le recul, j’ai parfois du mal à me souvenir de ces temps de malheur et ils semblent s’effacer aussi surement que les stigmates du Big Day, aussi surement que San Francisco devant New Heaven et c’est à cela que je songe lorsque grimpée derrière son dos, nous fendons les rues et que le paysage défile devant mon regard dans une sensation grisante de vitesse et de sécurité. J’aime les deux, il le sait. Sanzo ne me laissera jamais avoir mal, il me protégera toujours et je crois en sa parole comme en celle de ma mère. Je suis chanceuse, amoureuse et chanceuse. Ca je le sais et c’est pourquoi mes mains se crispent encore plus contre ses flans en un geste d’affection.

Le marché est déjà encombré, c’est normal avec un temps aussi doux et puis il n’est plus vraiment tôt. Nous discutons de choses et d’autres en furetant, je le moque, nous rions sur cette dérouillée impossible que j’administrais à Karl, il sait que j’essaierai et que je ne me dégonflerais pas, je fais toujours ce que je dis, c’est dans mon tempérament. Hélas pour lui. J’ai dit que je n’étais pas prête à coucher, je m’y tiendrais malgré tous ses artifices de séduction mais dieu sait que ça me démange. Mais cette attente est devenue presqu’un jeu, un jeu un peu pervers, c’est clair mais j’ai d’autres…friandises pour nous faire patienter. Il sait y faire, il a toujours su y faire avec moi de toute façon.

L’amour est un sentiment si particulier que parfois, j’ai du mal à penser que d’autres personnes puissent ressentir sa puissance. Il n’est pas unique mais à mes yeux, il l’est. C’est la chose auquel je tiens le plus même si par fierté, je ne dis pas assez ces choses-là. Mais je ne l’idéalise pas, il est intelligent c’est un fait. Il sait déjà ces choses qui n’ont pas vraiment besoin d’être prononcées.

alors tu trouves ? Y a des trucs qui te plaisent ?

J’esquisse un sourire entendu alors que je sens son étreinte se resserrer sur ma taille et pointe de l’index un ras du cou en tissus noir avec une pierre taillée en forme de goutte d’eau d’un vert un peu passé et brillant.

- C’est de la jade, une émeraude ne couterait pas si peu cher…C’est cool, du coup elle est faite pour moi. Jade pour Jade ! Et puis si ça me plait pas, je pourrais toujours « changer » sa couleur par un tour de passe passe…
Ça fera au moins quelque chose de vert chez moi…C’est beau mais intimidant d’avoir les yeux noirs…

Je lève la tête pour le regarder clignant des yeux plusieurs fois pour attirer son regard et mon expression se fait plus sérieuse alors que je finis par m’apatienter.

- Ça marche ? Elle te plait ton Asiat’ aux yeux verts ?

Manipuler la couleur d’une partie de son corps est un exercice de précision très stressant parce qu’à moins de le faire devant un miroir, il est impossible de constater la réussite ou non. Altérer le champ chromosphérique sur une si petite surface que l’iris, ça nécessite vraiment de la précision et de la concentration…c’est encore très complexe pour moi. Je cesse rapidement l’exercice sentant le mal de crane arriver et lâche un gros soupire.

- Fin du spectacle…ouff…bon je te laisse négocier minou…

Oui c’est mesquin, il paye c’est comme ça. Mais je sais que ça le conforte dans sa testostérone. C’est mon côté peste et je sais qu’il m’aime pour ça aussi. Je reste en retrait alors que mon portable sonne. Je reconnais la sonnerie, je sais exactement de qui il s’agit.

- Ouais…salut......Oui réveillée…faut arrêter avec c’te légende….et toi gueule de bois ? Ok…qu’est ce tu….hein ? Par le Sang du Christ, vois ça avec Maman….mais nooooon…arrêtes….tu dis des âneries…..non, c’est pas ce qu’elle v..mais ssiii…. Ecoute nous on est content de te revoir…quoi ? Comment ça « jusque quand ? » Je suis très patiente Ais’, il est impossible d’exaspérer quelqu’un d’exaspérant, tu te souviens…Non…Tu viens….fais pas ta conne ok ? Ecoute j’suis pas chez moi là…je te rap..hein ? Non avec Sanzo…QU…MAIS NON !!

Légèrement rouge je me tourne pour échapper à la vue de mon compagnon, murmurant même si je sais que c’est inutile car il entend toujours tout.

- On a dit que tu ne m’emmerderais plus avec ça….non..et non…je …je ne veux pas en parler. C’est pas parce que tu t’envoies tout ce qui bouge que…NON, essaye seulement, je t’arrache la tête, plaisante pas avec…oui mais c’est toi…tu m’gonfles…déjà que Maman aussi…hein ? Mais non elle ne couche pas avec Reiji, manquerait plus que ça…et elle est homo, hein…Non pas moi et tu le sais très bien…tu fais ce que tu veux, c’est ton cul….non je ne te le passerais pas, t’es chiante….Oui…oui…écoute tu….ouais…je lui passe le bonjour et non il n’est pas à poil dans le lit.

Je me retourne adressant un regard blasé à Sanzo.

- Oui…quoi ? C’est quoi encore ta connerie…accouche…c’est quoi ton secret…vas-y…ben j’écoute…

J’aurais dû me méfier, peut être le manque de sommeil, pourtant je la connais. La voix de Aislinn hurle dans le téléphone bien assez puissante pour me vriller les tympans et être entendue de l’extérieur.

- HEY SANZO ! MORDS-LUI LES TETONS, LES MEUFS ADORENT !!!!

- C…Connasse !!!

Je lui raccroche au nez, rouge de honte. Ma sœur reste l’une des seules personnes au monde devant qui je suis bien incapable de tenir la distance. Mais qui le peut devant cette furie ? Il a fallu un certain temps pour que Sanzo s’accommode de son caractère si particulier car au fond, Aislinn est une grande gueule à grand cœur qui n’a pas une once de méchanceté en elle mais elle est comme ça. On l’accepte ou on la déteste. Au moins elle respecte mes choix et Sanzo, elle lui a même sorti en partant qu’elle lui confiait la charge de me protéger en son absence ! Un comble, elle qui ne prend jamais soin d’elle.
Je range mon portable et observe Sanzo.

- Désolée…c’est…ben tu sais comment elle est…je crois qu’on se prépare des cheveux blancs avec son retour…On va au Starbuck ?

Je lui attrape le bras pour continuer ma promenade.

- Elle va intégrer la dernière année des aspirants…tu l’auras dans les pattes pauvre minou…essaye d’être cool avec elle…C’est quelqu’un d’adorable quand on la connait vraiment…c’est juste…elle ne trouve pas sa place…elle agit comme une petite conne…et c’est elle « la grande » sœur. Enfin tu connais ça avec Océanne ? Non ?

elle a trouvé une belle pierre verte, du jade comme elle. Je souris quand elle m'explique que l'émeraude couterait plus cher. Je le sais. Si je ne me retenais pas elle serait couverte de diamant mais je sais qu'elle n'aimerait pas.

Ses yeux noirs. Elle cherche mon regard, je plante mes yeux dans les siens. Elle les "passe au vert".

- Ça marche ? Elle te plait ton Asiat’ aux yeux verts ?

"oui ça marche et non ça ne me plait pas" la réponse est clair et directe. Je passe doucement un doigt sur ses paupières "je t'aime comme tu es, mes beaux yeux noirs. Et puis ils ne sont pas noirs, ils ont la couleur d'une nuit sans lune. Et j'aime la nuit."

quoi c'est beau non ?

J'ai une envie folle de l'embrasser sauf qu'elle me plante là. En plus je dois payer. Je n'apprécie que moyennement mais bon je suis le meilleur petit ami du monde.

Pendant que je règle le vendeur son téléphone sonne. Je grimace. Sa mère ... sa soeur ... sa soeur ... sa mère ... j'ai une chance sur deux.
Sa soeur. Je soupire. Quelle chieuse. Elle peut pas nous lâcher. Enfin ...

Attention je l'aime bien Aislinn c'est juste que ... c'est Aislinn. Je me demande toujours quand elle va penser grandir.
Je fais semblant de ne pas écouter la conversation mais mes oreilles sont directement dirigées vers Jade. Malgré le bruit ambiant j'arrive à l'entendre ... et manque de m'étrangler.
Cait et mon père ...
non jamais, aucune chance, impossible ...
au secours pas ça ...
beurk c'est dégueu en plus ...
faut que je demande à Karl mais est ce qu'il me le dirait ...
impossible Cait n'aime que les femmes et mon père ...

je soupire. Pitié Seigneur pas ça.

Je secoue la tête cherchant à me débarrasser de cette idée quand j'entends la voix d'Aislinn. Je ne suis pas le seul d'ailleurs tout le marché l'entend et peut être même le quartier voir la ville entière. Je rougis violemment. Jade aussi. Je vois quelques sourires moqueurs, embarrassés, intrigués. Des sourcils froncés, agacés, amusés.

Jade m'observe et s'excuse de sa part. Je hausse les épaules cool même si ça me gonfle. Je n'aime pas ça. Aislinn est assez grande pour s'assumer. D'un autre coté ...

(quoi non je n'ai jamais pensé à lui mordiller les tétons ... enfin pas vraiment ... ... je garde quand même cette idée dans un coin de ma tête. Est ce que les filles aiment vraiment ça ?)

Jade m'attrape par le bras et on s'éloigne direction le Starburk. Voilà en plus de l'image de Cait et mon père, j'ai ... non ... je dirais rien. Je garde mes pensées pour moi. Heureusement qu'elle n'est pas télépathe. L'horreur.

Elle poursuit sur Aislinn. La petite soeur qui s'inquiète pour la grande. Je connais ça. Ouai Océane peut être ultra chiante, je plains le pauvre Tyee.

Je hoche la tête."ouai je plains le pauvre Tyee. Elle va lui faire une vie d'enfer ... enfin il l'a choisi. Mais t'inquiète pas je prendrais soin d'Aislinn comme ta mère a pris soin de moi. Tu vois c'est aussi ça être un X-men. On prend soin les uns des autres. On transmet ce qu'on a reçu. "

je me tais un léger sourire contrit étire mes lèvres. C'est sorti tout seul. Je l'attire à moi joueur "et qu'est ce que j'aurais en récompense ?" je lance moqueur, puis dans un murmure à son oreille "un mordillement des tétons ?"

je me prépare à recevoir un coup ... mais peut être qu'elle aimerait. Avec Jade je peux pas savoir. On y va tranquillement et au final cela me va. Je sais ce que certain mec pourrait penser mais je m'en tape. J'estime pour ma part qu'un vrai mec ne force pas sa copine à coucher si elle ne le souhaite pas. Un vrai mec sait attendre, il comprend et respecte sa partenaire. Et je suis prêt à démolir tous ceux qui se moqueront. De toute façon cela ne regarde qu'elle et moi.
Je ne sais pas si mon père comprend mais Karl si. Et Jade. Et c'est le principale pour moi. Le Starbuck est en vu. Je lui tiens la porte. Il fait bon à l’intérieur et l'arôme du café me remplit les narines. J'inspire à fond. Miam. On fait la queue, commande. Bien sur je paie. Et on s'installe tranquille à une petite table. Nos genoux se touchent, j'adore. Son odeur mélangé à celui de nos cafés est divin. Le mien est couvert d'une épaisse couche de crème qui me reste sur les lèvres.
"dis moi " je lance brusquement "elle n'était pas sérieux ta frangine à propos de ta mère et mon père ?"

cette question me tracasse vraiment. Je sais bien que Cait c'est les filles qu'elle aime mais ... mon père peut être très convainquant. Et puis il est riche et beau. Et riche. Je sais que Cait a ce qu'il faut mais ...
J'aime mon père mais ...
je le connais. Je sais qu'il a un coté sombre. Je sais aussi qu'il ne recule devant à peu près rien. Mais je sais aussi qu'il ne me fera jamais de mal. D'un autre coté, Cait est séduisante et presque aussi sombre que lui.

Je fixe Jade interrogateur. Dire qu'on était parti pour une matinée sympa. Quelle merde.

bon autant pour la provoque. Elle reste de marbre ce qui est un comble pour du Jade
(je sais mon humour est débile)

puis elle me chuchote à l'oreille des mots qui me plaisent (voir m'excitent). Elle est comme ça Jade, chaud et froid en permanence mais c'est ce qui me plait. Je ne sais jamais à quoi m'attendre.

Et elle me rassure. C'est aussi ça Jade. Par certain coté elle est bien plus adulte que moi. Faut dire qu'entre sa soeur et sa mère elle n'a pas non plus trop le choix. J'adore Cait. Elle a beaucoup fait pour moi. Je peux dire même que c'est grâce à elle que j'en suis là aujourd'hui. Mais parfois je la trouve un peu ... enfin Jade a raison et puis c'est sa mère à elle. Mes yeux se fixent un moment sur ses mains qui tiennent le café avant de remonter dans les siens.
Je sais aussi ce qu'on raconte sur Cait, c'est même encore pire au Centre. Je sais ce que Jade ressent. Être le fils ou la fille de c'est pas facile. J'ai du me battre contre ça, montrer qui j'étais, ce que j'étais vraiment. Certains l'ont vite compris d'autres en revanche ... Je me bas encore car il y a toujours des imbéciles même à NH.
Je sais aussi (et ça je ne suis pas sur que Jade le sache) que papa garde un oeil sur Cait. Peut être pour elle, plus probablement pour moi. Il est ultra protecteur.

tu te souviens ?

notre première rencontre. Oui je m'en souviens. La guerre était finie, du moins le "monstre" était mort, disparu comme tant de personnes humains, mutants, tellement de morts.
Père voulait reconstruire et gagner encore plus d'argent. Je ne me fais pas d'illusion, le coté altruiste de mon père n'existe pas.
Moi tout ce que je voulais c'était les voir. Ces "super héros" qui nous avaient délivré. Qui avaient fait don de leur vie pour sauver l'humanité. Je voulais surtout revoir cette belle femme aux cheveux blancs. La revoir et lui dire que j'avais tenu ma promesse. À mon échelle. Je les avais aidé.

Océane était malade et Colin n'avait  pas voulu venir. Il détestait ça. Du coup, il n'y avait que moi. Je m'en fichais je voulais juste voir les X-men. Bon les petits fours étaient vraiment appétissants.

Je lui souris  "ouai je m'en souviens. On était les seuls gamins. Les adultes parlaient de ta mère et l'un deux a mentionné ton nom. C'est comme ça que j'ai su qui tu étais. La fille du Beaver. T'imagine la chance que j'avais. J'allais parler à la fille de la grande X-men. Je t'ai regardé un moment. T'avais l'air si ... triste et seule. Tu ressemblais pas à ta mère du moins physiquement mais tes yeux si. J'ai rempli une assiette de petits fours et je me suis approché. J'ai tendu l'assiette en te disant bonjour. J'ai pas oublié ton regard surpris et méfiant. Je sais plus trop de quoi on a parlé mais quand je t'ai demandé si tu voulais devenir une X-men comme t'as mère et que tu as répondu que la seule chose que tu voulais c'était lui rendre le sourire je suis tombé amoureux. Et je me suis juré moi aussi de te faire sourire. De toujours te faire sourire. "

j'attrape sa main et la caresse, elle semble de nouveau si triste, j'ai horreur de ça. "Tu sais ce que je pense des gens qui se cantonnent au physique ... (je laisse un bref silence. Oui elle le sait). Tu es une Oldfield ma chérie, n'en doute jamais. "

c'est vrai qu'elle ne ressemble pas plus à Cait que je ne ressemble à mon père mais ils sont nos parents et nous sommes ce qu'ils ont fait de nous. Pour moi c'est le plus important. Moi non plus je ne veux pas d'autre père que le mien.
Jade poursuit dans ses souvenirs. C'est vraiment la fille de Cait avec cette sensibilité à fleur de peau, tout comme Aislinn. Jade le cache mieux, sauf avec moi.

Je rigole. J'avais pas apprécié. Je ne voulais pas que Jade soit ma soeur, je l'aimais déjà. Et puis j'avais déjà une soeur alors une deuxième.

"ouai et quand on est rentré après ce soir là, j'ai fais la gueule. Qu'est ce que j'étais con à l'époque. Océane me l'a toujours dit mais elle avait raison. J'étais con et jaloux. Je te voulais déjà rien que pour moi."

j'attrape doucement sa main, la décollant du café. Mon pouce trace des petits cercles sur le dessus de son gant. "tu sais même si tu n'avais pas été la fille de Cait je serais venu te parler. "

et j'étais sincère. Je n'ai jamais aimé voir les autres souffrir.

J'ai toujours sa main dans la mienne "et ... ça t'ennuierait ? Qu'on se marie je veux dire. Un jour ... "  

peut être que le mariage d'Océane m'a influencé. Elle est si heureuse.
Peut être que simplement j'ai toujours eu le sens des responsabilités.
J'en sais rien.

"pas pour nos parents mais pour nous, juste pour nous. "

ça peut paraitre bizarre de parler mariage alors qu'on a jamais vraiment couché ensemble. Et puis on est si jeune mais je m'en fous. Tout comme je me fichais que nos parents soient d'accord ou pas. Tout comme j'ai tenu tête à Cait quand elle m'a demandé de choisir entre Jade et les X-men m'expliquant que la vie serait bien assez dur comme ça.
Je sais qu'elle cherchait à bien faire, je ne lui en ai jamais voulu. Elle voulait aussi protéger Jade ce qui est normale.
Je me souviens lui avoir répondu que Jade n'était pas elle et que moi, j'étais moi.

C'était pas sympa mais sur le moment ça m'a énervé.
Je ne sais pas si papa est intervenu mais lui non plus n'était pas très content. À lui je lui ai dit de se mêler de ses affaires. Ça non plus c'était pas sympa.
Je me suis excusé après. Excuses qu'il a balayé d'un geste avec son curieux sourire. Ce sourire que je n'arrive jamais à décrypter. Et pourtant. Et bien sur Karl n'a rien voulu m'expliquer une fois de plus.

Ensuite nous avons eu une longue conversation tous les trois sur les responsabilités et le sexe. Encore. Je leur avais rien dit mais j'avais eu le droit déjà avec Océane.

Je la regarde toujours interrogateur. Elle sait qu'elle n'est pas obligée de me répondre de suite. Elle sait que je ne la forcerais jamais à quoique ce soit.
D'un autre coté j'avoue que je ne sais pas ce que je ferais si elle me répondait : ok marions nous de suite.
mais bon vu qu'elle en parle comme "un problème" ....

Encore une fois j'ai mis les pieds dans la litière. Je ne peux pas m'en empêcher. D'un autre coté, je pense (et ça j'en suis sur) que si je ne fais rien, on n'avancera jamais. Alors tant pis ...
De toute façon le jour ou ça la gonflera vraiment elle me le dira. J'ai du mal à comprendre sa gêne. Qu'elle ne trouve pas les mots, à la rigueur mais qu'elle soit à ce point gênée. Tout le monde s'en fout royalement. Et plus nous sommes dans un endroit public plus les gens s'en foutent.
Il suffit de les regarder. Il y a de tout. D'autres jeunes couples comme nous qui ne se quittent pas des yeux même si une bombe venait à exploser. Des hommes d'affaires leur téléphone collé à l'oreille. Des étudiant(e)s bouquinant, révisant, bavardant ... bref toute une population et nous.
Elle et moi.
Un garçon et une fille.
Un couple de plus.

Et je ne parle même pas du brouhaha, de la musique, des serveurs qui gueulent, du chien qui aboie ... alors qui notre conversation intéresse ?

Elle est stressée et je me sens penaud. Je n'aime pas la voir ainsi. Depuis le temps pourtant mais non. Et puis ce n'est que moi. Moi.  

- Tu es mon prince charmant…on n’a pas besoin d’en faire étalage. J’ai besoin de liberté, de me sentir vivante…de sentir mon avenir entre mes doigts. Il sera bien tant de voir demain pour vivre ensemble et se marier, vivons aujourd’hui déjà.

je baisse les yeux sur mon café. Ma mâchoire se crispe légèrement. Je n'ai jamais su, ni pu, ni même vraiment voulu cacher mes sentiments quels qu'ils soient. "en faire étalage" ...
Cela me rappelle un conseil d'Océane au début de notre "histoire". Nous venions de passer du stade de copain-copine à celui de petit(e) ami(e) et j'avais offert l'un de mes nombreux et improbables cadeaux à ma "petite amie". Je pensais lui faire plaisir et surtout qu'elle apprécierait ... je la connaissais bien mal. Jade n'avait manifesté qu'un enthousiasme mitigé, très mitigé. Le minimum pour ne pas me faire de peine, ce qui avait été totalement raté.
J'en avais donc parlé à ma soeur. Elle avait dans un premier temps haussé les yeux en soupirant avant de me dire d’arrêter de pleurnicher comme un bébé ...
sympa la frangine.
Puis, elle avait pris mes mains, m'avait fixé dans les yeux. Je connaissais cette technique, je l'avais baptisé : la technique du sermon mais bon c'était moi qui était allé à elle.
Océane m'avait simplement dit ceci : "tu l'aimes ?"
j'avais été tellement surpris que j'étais resté quelques secondes sans rien dire avant d’acquiescer
"alors prend la comme elle est"
puis elle m'avait lâché les mains et demandé de sortir car elle avait des devoirs à terminer.

Je n'ai jamais oublié son conseil. J'essaie le plus souvent de m'y tenir. Même quand cela ne me plait pas ou me fait mal. Même s'il m'arrive de déraper.

Oui je l'aime.
Oui je dois la prendre comme elle est. Et si elle ne veut pas de mariage tant pis.

- Par contre l’année prochaine, je compte me fiancer. A toi de voir si tu veux en être ou pas.

Je me redresse sans lui laisser le temps de respirer en lui tendant la main, contente de mon coup de massue, ça lui apprendra et il pourra juger du romantisme à la Sanzo, j’ai un bon professeur.

- J’aimerai que tu en soi bien entendu, ça serait difficile de trouver quelqu’un d’aussi habile avec une aussi belle et grosse…..moto ? On va voir le Golden ? On a un peu de temps, la plage est agréable à cette heure de diner.

A t elle senti ma peine ...
avait elle cela en tête dès le début ...
ou tout simplement ne faisait elle que du Jade ...
aucune idée
en tout cas, elle avait encore gagné ... j'ai marché et même couru.

Elle a beau dire, elle est bien la fille de Cait.

Je lui souris soulagé et rassuré. On a chacun besoin de preuve même les plus infimes. Et je crois que je préfère sa réponse sincère à tous les "oui" qu'elle aurait pu me dire.

J'attrape sa main et la serre. Je l'aurais bien embrassé mais "pas d'étalage" ...

"ok pour la plage." j'espère qu'elle n'a pas l'intention de me noyer.

La plage est sympa et puis il n'y a pas trop de monde. Je préfère quand même celle de Miami. Peut être parce que j'y ai mes habitudes. Ici tout me semble artificiel. Presque faux. C'est étrange car une plage n'est qu'une plage. Et du sable du sable quelque soit le lieu.

J'ai oté mes chaussures. Marcher pieds nus est un vrai bonheur. J'aime sentir le sol et encore plus le sable. Je ne m'approche pas trop de l'eau. J'en ai toujours une grande aversion. Je passe un bras autour de la taille de Jade en lui souriant.

J'inspire profondément l'air iodé. "tu as raison. Profitons en maintenant. Sinon quoi de neuf ? Les cours ? Toujours trop facile pour toi."

je la taquine mon petit génie. Elle est plus intelligente que moi. Au début cela m'agaçait un peu. Mon orgueil de mec en prenait un coup. Et puis j'ai fini par l'accepter. Combien de fois a t elle essayé de me convaincre de la beauté d'une suite de chiffre ou de formules ultra compliquées, auxquelles je ne comprends de toute façon absolument rien. Et combien de fois je la voyais sceptique lors qu'à mon tour je lui parlais philo, psycho et autre ...

et au final j'aime ça. Nos discussions sont animées mais toujours très tendres et complices. Et maintenant c'est devenu un jeu entre nous. Et voir ses yeux brillants d'avoir le dernier mot est ma plus belle récompense.

J’ai une fascination pour l’océan parce qu’il signifie une fin et un commencement. Petite, il m’arrivait de m’échapper de China Town pour venir flâner des heures, assise sur un rocher à regarder les eaux se mouvoir à l’horizon de cette vie que je jugeais « trop restreinte ». Je n’avais aucun avenir, aucune solution et aucune perspective de changement. Je savais que mon destin me pousserait à être une fille « différente » essayant de surnager dans un torrent d’excréments, mais jamais un instant je n’aurais pu envisager la tournure qu’a pris ma vie ensuite. Secrètement, j’en suis parfois à considérer le Big Day comme une bonne chose, je ne l’exprime pas bien sûr ! Il n’est pas morale de se réjouir des millions de morts qu’à fait Ultimate, ni des drames personnels qui ont balafré maman et grand-mère. Mais sans Ultimate, au mieux je serai devenue une de ces nombreuses putes qui arpentaient les trottoirs de China Town, au pire une fois ma mutation découverte, j’aurai été internée et déportée dans un camp de rétention. Finalement, je suis peut-être la seule personne que ce monstre a sauvé en lui offrant une autre vie, Maman persiste à affirmer qu’il s’agissait de Calie mais je ne connais d’elle que des regards humides de Caitlyn, quelques photos déjà figé dans le temps et parfois quelques mots arraché ma sœur qui la définie comme « quelqu’un de cool ». J’ai perdu une de mes mères avant même de la connaitre, ma vie aurait sans doute été différente, je n’en sais rien. Notre vie de famille est étrange mais c’est Notre famille et je l’aime : la protection étouffante de maman, la désinvolture d’Aislinn, la sagesse de Grand-mère. Pour rien au monde je ne voudrais que cela fusse différent même si mon esprit mathématique se perd souvent en analyses de probabilités et de variabilité de paramètres.

La fin d’un monde, oui. Celui qui était inéluctable, écrit, inévitable et qui à présent s’est vu étouffé au prix de nombreux sacrifices que d’autres ont payés pour moi. J’en ai conscience. Je ne suis pas altruiste, je concède volontiers que je suis égoïste et parfois égocentrique même si je ne l’avouerai jamais devant les autres…mais j’ai une responsabilité devant cette fin. J’ai une obligation de faire de ce commencement quelque chose de grand et de beau, quelque chose d’utile. Je dois réussir, je dois changer l’avenir puisqu’il a changé pour moi. Je deviendrai une grande scientifique, je percerai les mystères de la science et mon nom signifiera que j’ai ouvert l’océan à d’autres, que j’ai tracé un chemin…C’est ainsi que moi, Jade Oldfield, je vois ma place face à l’océan, face à cette cité, face à cette vie.

Ce serment secret, je le renouvelle face à l’océan, blotti dans les bras de celui que j’aime. Nous sommes les enfants de New Heaven et nous portons déjà un héritage lourd de sens et lourd de responsabilités. Je l’accepte comme lui l’accepte, j’espère juste que nous aurons le temps pour être heureux un peu.

Tu as raison. Profitons en maintenant. Sinon quoi de neuf ? Les cours ? Toujours trop facile pour toi

Je lui souris faiblement toujours perdue dans mon monde en me laissant envelopper par lui et ressentant par son contact ce sentiment si soulageant de protection et d’affection.

- Humm ? Le recteur parle de monter une section d’élites de 4 ou 5 grosses têtes comme ils disent…Mon nom circule…ça n’est pas pour me déplaire. De toute façon, personne ne me surpasse sur trois sections en mathématiques pures et appliquées, et maintenant que j’ai mis le nez dans physique quantique, c’est comme si…je faisais des « cahiers de vacances », c’est de l’application théoricienne de bases que je maitrise déjà depuis que j’ai eu mes premières règles…donc…Le seul truc qui me fait chier…c’est que Lenoir en sera aussi. Cet hypocrite mielleux et fourbe est La bête de la fac en informatique et programmation….mais tu l’as déjà aperçu…ce mec est…je ne sais pas ;..malsain. Il me dérange sous ses bonnes manières…et puis fait chier, il reste toujours devant en info…je n’arrive pas à la surclasser…manquerait plus qu’il essaye de me faire de l’ombre en maths ! tu t’en rends compte ? Je serais forcée de me mettre à bosser, j’veux dire…vraiment ! D’façon, qu’il vienne…je ne laisserai personne me faire de l’ombre sur MON domaine …ou alors, je t’enverrai lui péter la tête…tu ferais ça pour ta chérie Mmmmm ? Je fais des jalouses tu sais…sortir avec l’un des meilleurs éléments des aspirants X…c’est quelque chose.

Je prends une voix légèrement moqueuse à dessein.

- Mais puisque Aislinn réintègre…Il va y avoir du challenge, noonnn ? J’y entrave trop rien à vos formations mais la section Hopes en Europe c’est pas des rigolos d’après ce qui se dit, j’ai « laisser mes oreilles trainer » ça et là quand Maman était au téléphone…Il parait qu’elle faisait déjà des missions sur terrain ? C’est chaud ça non ? Tu vas pas sur le terain…toooooah.

mes bras autour d'elle, mon regard tente de suivre le sien.
Que voit elle au delà de l'eau ?

Elle aime l'océan.
Elle aime cette grande étendue d'eau mouvante.
Pas moi.
J'ai essayé pourtant. Pas pour elle. Pour moi.
J'ai essayé avec Océane plus jeune.
Avec mes copains du X-center.
Avec les instructeurs
en vain.

Ce n'est pas de la peur, après tout ce n'est que de l'eau, c'est ...
je ne sais pas.
Une aversion profondément enfouie.
Un instinct ancestral.

Je n'aime pas l'eau. Je n'aime pas la mer. Et pourtant.
Cette odeur iodée m'électrise.
Les grains de sable sous mes pieds m'excitent.
Ça j'aime.
Peut être qu'au delà de l'eau, c'est cette immensité qui me fait peur. Ne pas savoir. Ne pas en voir la fin.
Non ... je n'aime pas plus la piscine de la maison ...
et puis le ciel est tout aussi immense et insondable et lui je l'aime.

Peut être tout simplement je n'aime pas l'Océan car elle n'est plus là. Elle n'est plus avec moi.
Suis je simplement jaloux ...
hum ...

je souris à ses paroles même si sa voix est lointaine. L'océan me l'a prise en cet instant. Je le déteste.
Je retiens un grondement. C'est idiot. Je le sais.
Mais si l'Océan avait figure humaine, je n'hésiterais pas à le déchiqueter.
Sale voleur.

"Lenoir" ?? je ne sais pas qui c'est. Et là mon grondement sort. Pauvre gars.
Oui je lui "péterais la tête" pour elle.

Je lui souris de nouveau tout en serrant un peu plus mes bras. Je cherche qui peut être ce type mais non je ne vois pas. Je note mentalement de faire une petite recherche sur lui.
... ...
pff je deviens comme mon père.

Mon père ... Lenoir ... oui ce nom me dit quelque chose. Un truc dans les hôtels, je crois.
Mon sourire s'élargit. Je ne sais pas quelle relation mon père a avec cette famille mais si en plus il se met Jade à dos ...

pas de conclusion hâtive Minou, c'est peut être un type bien.
Non impossible.

Ouai je ne suis pas objectif mais c'est normale non.

Jade me tire de mes pensées en me parlant d'Aislinn. Pff celle là aussi quelle merdeuse.

Tout le X-Center la connait déjà et pas parce qu'elle est la fille de Cait. Non.

J'ai un reniflement méprisant que je regrette aussitôt. "la section Hopes" ... elle n'a pas super réputation au Centre.
Des têtes brulées. Des paumés. Voilà ce qui la compose. Du moins c'est ce qui se dit.

"hum ... je ne pense pas qu'on soit dans la même section. Ta soeur ... "

j'hésite à poursuivre.
"tu sais le terrain ce n'est pas que "poursuivre les méchants". Y a tout un travail en amont puis en aval. Les mômes qui sont récupérés sont perdus, tristes, violentés le plus souvent et ... "

de nouveau un silence. Elle le sait tout ça. Elle l'a vécu. Elle l'a été.  

Je l'embrasse tendrement. Si, je suis déjà allé sur le terrain. Pas les rues à l'extérieur mais le terrain de l’intérieur. "l'après". Je l'ai même fait bien avant tout ça. Bien avant le Big Day, bien avant NH.

Je l'ai fait un vilain soir d'avril. Je n'avais que 9 ans. Alors oui le terrain ça me connait aussi.
Mais je ne dis rien. Je n'aime pas me vanter de toute façon. Je sais que chacun fait selon ses moyens, selon ses aptitudes, selon son gène.

Et puis Aislinn est sa soeur, elle l'admire, tout comme j'admire la mienne.

Une légère vibration dans ma poche, je soupire. Mon alarme de portable. "bon faut pas qu'on soit en retard sinon ta mère va me tuer." je n'ai pas vraiment envie de bouger même si la mer montante n'est plus très loin de mes pieds. Le vent joue dans les cheveux de Jade, je respire son odeur.

J'attends qu'elle bouge. Je resterais des heures ainsi. Jade tendrement blottie dans mes bras. Nos joues reposant l'une contre l'autre.

"tu sais le terrain ce n'est pas que "poursuivre les méchants". Y a tout un travail en amont puis en aval. Les mômes qui sont récupérés sont perdus, tristes, violentés le plus souvent et ... "

Sanzo , tu parles toujours trop vite, si vite que parfois tu en oublies à qui tu parles et si je garde le silence c’est aussi parce que je sais aussi qu’avec la même rapidité avec laquelle tu exprimes tes idées, tu finis inévitablement par comprendre la bêtise ou la portée de tes propres mots. Je sais tout ce que tu me dis, je le sais plus que bien et si j’affiche les turpitudes et le comportement désinvolte de la jeunesse upée de Paradise, jamais l’odeur, jamais le souvenir des années plus terribles ne pourrait s’estomper ou s’évaporer de mes vêtements même à 500 $. J’ai laissé tout cela derrière et je ne veux plus en parler, peut-être un jour quand le moment viendra mais pas pour l’instant, pas tant que j’essaye de construire ma vie et d’avancer avec toi à mes côtés.
C’est un des grands non-dits entre nous. Une de ces blessures dont je veux garder le contrôle au-delà de ces simples traces de coups de fouets qui me balafrent le dos. Mais je sais aussi que tu en sais le fin mot car ma mère a été assez bavarde pour t’ôter l’envie de creuser dans la tourbe et d’aller là où ça fait le plus mal ; Un jour je te promets, un jour nous parlerons jusqu’où ça fait trop mal, toi tu me diras que c’est inutile et moi je te répondrais que c’est inévitable et tout sera dit.
Je le laisse déposé un léger baiser qui me permet de repousser plus loin la cohorte de démons intérieurs qui heurtent à la porte et je soupire, frissonnant légèrement.

"bon faut pas qu'on soit en retard sinon ta mère va me tuer."

Aucun risque qu’elle s’énerve si je suis présente et que je peux désamorcer ses humeurs, je suis la seule à pouvoir y parvenir et d’aussi loin que je me souvienne.

- Ça ne risque pas d’arriver, ce n’est pas parce que personne ne sait s’y prendre avec elle que moi je ne le sais pas. Elle t’aime comme son fils enfin…c’était le cas avant que tu mettes tes pates sur ma peau…nue. Depuis elle a de nouvelles….inquiétudes…C’est ma mère, quoi. Mais tu as raison, je crève la dalle, Minou !

Je me sépare de lui, tourbillonnant sur moi-même en riant sans vraiment de raison précise autre que d’être ici et avec lui. Mon expression se fait plus sérieuse alors que je lui tends la main pour l’inviter à prendre ma suite.

- Et j’ajouterai…Je ne veux pas de querelles avec Aislinn et cela n’est pas négociable, elle ne montre toujours que le pire d’elle-même mais laisse lui le temps de te montrer le meilleur, elle est quelqu’un de bien même si elle veut se convaincre de l’inverse.
Je ne devrais pas le dire mais…je crois qu’elle a eu des problèmes là-bas…J’ai cherché ce que j’ai pu, ma mère a du se déplacer en Irlande plusieurs fois il y a 4 mois, elle parlait souvent au téléphone à des…des médecins…J’ai vu des notes portant sur l’ESPT…Etat de stress Post traumatique….ça correspond à cette période où je n’avais plus de nouvelles, maman disait qu’elle était privé de communication pour une énième conneries mais je sais quand elle ment. Il s’est passé quelque chose la bas, quelque chose de mauvais. Et j’ignore comment elle en est sortie mais ce que je sais, c’est qu’elle n’en laissera rien transparaitre et ça…c’est pire. Je compte vraiment sur toi sur ce coup !
On va vers le port ? Il y a un resto Japonais là-bas ! un « résistant » de l’époque du premier China Town…c’est la même enseigne mais plus les mêmes gens. J’ai lu des avis ultra positif la dessus sur le net ! Et cette fois ci c’est moi c’est moi qui paye !!


Place du Souvenir. 14 h.10

- Quoi ? Arrête de geindre !! On n’a que quelques minutes de retard….
Après, cette glace gratuite valait le coup ! Et si je n’avais pas négocié tout cela en chinois ET en japonais on aurait eu que deux malheureux café et basta. Tu as la petite amie la plus polyvalente de la terre et tu trouves encore le moyen de faire ta mauvaise tête…et je..Oh !! Regarde ! C’est la voiture et Tristan !

L’automobile, une sorte de limousine aux vitres teintées s’arrêta au niveau de trottoir. La portière côté passager s’ouvrit laissant entrevoir un habitacle de deux banquettes, d’où la première était libre. Jade fit le tour pour faire un petit signe de main au conducteur qui lui rendit.

- Heyy ! t’a sorti la Zine ? La classe Tristan !
- Bonjour mademoiselle, Il faut bien la sortir de temps en temps… Bonjour Monsieur Sanzo.

Avec un rire léger, Jade s’engouffra sur l’une des banquettes et tendit Caitlyn qui se tenait assise devant le ticket du restaurant.

- Note de frais, m’man !

L’irlandaise, vêtue en robe d’un jaune éclatant, baissa ses lunettes et y jeta un bref coup d’œil sans manifester la moindre émotion et la rangea dans son sac en soupirant.

- Pfff….Tu veux ma ruine…Bonjour jeunes gens. Et mon bisou ?

Elle se tapotait la joue avec un sourire entendu jusqu’à ce que Jade sautille de sa banquette pour y déposer un smack sonore. Elle lui rendit un regard chargé de tendresse avant de retirer ses lunettes et de porter un nouveau regard faussement sévère au jeune hybride. Elle finit par refaire son numéro en tapotant sa joue de l’autre côté.

- Toi aussi tu me snobes, petit crétin ? Ne me dis pas qu’embrasser une Oldfield t’embarrasse ?

Jade sur sa banquette soupira lourdement en manifestant son mécontentement.

- Mamannnn…
- Quoi ? Pour une fois qu’on sort tous les trois….

Je lève les yeux au ciel lorsqu'elle parle de sa mère. Je sais bien que Cait ne me ferait pas de mal, c'était juste une façon de parler. Jade a tendance à prendre les choses au pied de la lettre. Quand à ses inquiétudes pour nous deux, je vois les mêmes dans les yeux de mon père ... les adultes ...
ils ne nous font pas confiance, ce que je trouve un peu insultant vu notre comportement que je qualifie d'exemplaire.
Qu'est ce qu'ils s'imaginent ?
Que nous allons nous jeter l'un sur l'autre comme des bêtes pour ...

bon ça nous a peut être traversé l'esprit mais ni Jade ni moi sommes comme ça au contraire.
Déjà nous avons beaucoup trop de respect l'un envers l'autre et puis ni l'un ni l'autre sommes vraiment prêts pour ça.

C'est vraiment des idées d'adultes.

Enfin ... on ne les changera pas ni l'un ni l'autre et nous les adorons comme ça au final. C'est une forme d'amour. Un amour parental.
Et c'est rassurant.

Je regarde Jade tourbillonner et mon rire rejoint le sien.

Un léger soupire à l'évocation d'Aislinn ... je me retiens de me mettre au garde à vous et de la saluer.
Une nouvelle mission pour Minou. Même si Jade a un peu de retard, Caitlyn avait déjà évoqué le "sujet". Bien sur je n'ai pas pu refuser. De toute façon j'aurais accepté et encore plus pour elle.

---------------

14h10 et voilà nous sommes en retard. Je le savais mais non Jade a voulu encore une glace. Je me demande où elle met tout ça ... enfin ...

oui elle est géniale mais qu'est ce qu'elle m’énerve ... parfois ... un peu ... souvent ...
j'inspire profondément.
{calme minou, tranquille}

Jade se précipite vers la voiture, une limousine. Pire que celle de Père. Beurk je n'aime pas ce genre de voiture. En fait je n'aime pas trop me faire remarquer.
Attention, j'apprécie l'argent que j'ai (enfin mon père) mais de là à me balader en limousine.

"bonjour Tristan"

j'aime bien cet homme, même si le "monsieur" me fait tiquer à chaque fois.
Je suis Jade qui s'engouffre dans la voiture et qui a le culot de donner la note à sa mère. Je manque de m'étrangler.
Elle exagère je trouve.

"Jade" je ne peux m’empêcher de m'exclamer tout en hochant vigoureusement la tête.

Mais Cait semble trouver cela normale ... les femmes. J'imagine le regard de mon père si je lui avais fait le coup.  

- Toi aussi tu me snobes, petit crétin ? Ne me dis pas qu’embrasser une Oldfield t’embarrasse ?

je rougis.  
"non m'dame" je lui rétorque en souriant et en l'embrassant chaleureusement. Puis je lui en fais un second "de la part de Père"

bon il ne m'a pas dit de l'embrasser, juste "un bonjour" mais ça lui apprendra.
Puis je la fixe. Je vois sa tristesse. Je vois son amour. Je lui souris.
Pas facile. Entre elle et moi, il y a un passé.
Elle a été mon mentor, mon amie.
Elle l'est toujours mais de plus ma ... "belle mère" ... beurk je déteste ce mot (et elle aussi).

Je ne lui demande pas si ça va. Elle me répondra "oui" tout en sachant que je sais qu'elle ment.
Alors je m'installe tout en badinant.

"ouai c'est trop sympa tous les 3. "

je suis sincère. Puis je continue parlant des cours, du X-Center et de ses potins, d'Océane et son mari, de mes potes, de mon père  et de Karl, déviant sur les peoples et de leurs frasques, du temps aussi ... cherchant à combler le silence. Je ne me fais pas d'idée, je sais bien que je n'arriverais jamais à chasser ses idées noires mais si au moins pour quelques minutes elle se sent "mieux" je serais content.

Ma main cherche celle de Jade.